Un film… sur un film? Ou est-ce plutôt un film dans un film? Quoi qu’il en soit, Impetus, film « réalisé » par Jennifer Alleyn, est une oeuvre à la fois simple et complexe, d’une beauté tout aussi dantesque que fragile, un long-métrage qui appelle à la réflexion et à la contemplation.
Jennifer Alleyn tourne un film. Jennifer Alleyn tourne un film sur le fait qu’elle tourne un film. Dans ce kaléidoscope cinématographique, Emmanuel Schwartz doit y jouer un jeune homme qui cherche un sens à sa vie, et qui part, sur un coup de tête, jouer aux gardiens de domicile à New York. Histoire de ne plus penser à rien. Histoire de pouvoir enfin réfléchir, enfin créer.
Impetus, cette pulsion créatrice, cette détermination à aller de l’avant, c’est aussi la volonté d’une femme (Mme Alleyn elle-même) de se reconstruire, de se redonner un élan créateur après le départ de son conjoint. Pour se remettre en selle, elle s’inspire donc des images d’un homme ivre souhaitant tout casser sur son passage pour faire appel à Schwartz. Ce dernier, à la fois impénétrable et jouant à livre ouvert, acceptera de tourner, mais ses plans seront contrecarrés. La première fois, nous dit-on, l’absence sera de plus de deux ans, ce qui provoquera « un problème de raccord de barbe » de l’acteur principal. À la deuxième occasion, Emmanuel Schwartz doit quitter le navire, débauché pour une plus grosse production. Déclin. Émiettement créatif. Catastrophe artistique. Voilà la réalisatrice incapable de terminer son film. Cela lui donne au moins l’occasion de poursuivre son méta-film, l’oeuvre qui enveloppe toutes ces péripéties.
Arrive alors Pascale Bussières. Enfin, l’amie de la réalisatrice était là depuis les débuts, à répondre aux remises en question de l’artiste, mais elle remplace alors Emmanuel Schwartz au pied levé. À quoi bon créer un personnage en s’inspirant de son propre vécu, après tout, si l’on décide ensuite de faire jouer ce rôle par quelqu’un du sexe opposé?
Ce changement d’interprète correspond aussi à un changement de mentalité chez la réalisatrice. Après avoir traversé une période sombre, elle s’ouvre maintenant à de nouvelles opportunités, à de nouvelles perspectives. Qui sait ce que l’avenir lui réserve?
Mi-documentaire, mi-film de fiction, mi-making of, Impetus peut paraître hermétique au premier abord. L’action en est décousue, comme si la caméra suivait les coups de tête de la réalisatrice… Ce qui est probablement le cas, d’ailleurs. C’est pourtant en s’intéressant à ces changements parfois draconiens que l’on comprend la démarche de la créatrice. On se prend alors à se laisser aller, nous aussi, à lâcher prise pour se laisser emporter par les flots de l’inspiration, par les battements parfois désordonnés du coeur. Avec comme résultat, en bout de piste, un moment de plénitude que l’on voudra assurément prolonger.
Impetus est projeté à la Cinémathèque québécoise.
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