The New York Times
L’administration Trump envisage des sanctions contre de hauts responsables et des entreprises de Chine afin de punir la détention, par Pékin, de centaines de milliers d’Ouïghours et d’autres minorités musulmanes dans d’imposants camps de détention, selon des responsables américains.
Les pénalités économiques représenteraient la première occasion où la Maison-Blanche agirait contre la Chine en rais0n de violations des droits de la personne. Des responsables américains cherchent également à limiter les ventes de technologies de surveillance américaines que les agences de sécurité et des entreprises chinoises emploient pour surveiller les Ouïghours à travers le nord-ouest de la Chine.
Des discussions visant à dissuader la Chine de poursuivre son traitement des minorités musulmanes sont en cours depuis des mois chez des responsables de la Maison-Blanche, mais aussi du Trésor et du département d’État. Les démarches se sont toutefois accélérées il y a deux semaines, après que des membres du Congrès eurent demandé au secrétaire d’État Mike Pompeo et au secrétaire du Trésor Steven Mnuchin d’imposer des sanctions contre sept responsables chinois.
Résistance présidentielle
Jusqu’à maintenant, le président Donald Trump avait largement résisté aux appels à punir la Chine pour ses violations des droits de la personne, voire même d’accuser la Chine d’agir de la sorte. Si elles sont approuvées, les pénalités alimenteraient une guerre des nerfs déjà tendue avec Pékin à propos des relations commerciales et de la pression sur la Corée du Nord.
Le mois dernier, un panel des Nations unies a confronté des diplomates chinois à Genève à propos des camps d’emprisonnement. Ces sites font l’objet de critiques croissantes de la part de la communauté internationale, en plus d’avoir été vilipendés dans diverses enquêtes journalistiques.
Des défenseurs des droits de la personne et des experts en droit affirment que les détentions de masse dans le nord-ouest de la région du Xinjiang représentaient les pires violations des droits de la personne à survenir en Chine depuis plusieurs décennies. Depuis son arrivée au pouvoir en 2012, le président Xi Jinping a ramené la Chine dans le giron autoritaire, y compris en accroissant la répression des grandes groupes ethniques de l’ouest de la Chine, notamment les Ouïghours et les Tibétains.
Dimanche, l’organisation Human Rights Watch a publié un rapport détaillé concluant que les violations « étaient du jamais vu depuis l’époque de la Révolution culturelle ». Le rapport, basé sur des entretiens avec 58 anciens habitants du Xinjiang, a recommandé que les autres nations imposent des sanctions ciblées contre des responsables chinois, empêchent la distribution de visas et contrôlent l’exportation de technologies pouvant être employées dans le cadre de ces détentions de masse.
Toute nouvelle sanction américaine serait annoncée par le Trésor après des consultations pan-gouvernementales, y compris au Congrès.
Dans les camps, les musulmans chinois sont forcés d’assister à des cours quotidiens, à dénoncer des aspects de l’islam, à étudier la culture chinoise dominante et à jurer fidélité au Parti communiste chinois. Certains détenus qui ont été libérés parlent de torture.
Des responsables chinois ont parlé du processus comme d’une « transformation par l’éducation » ou « éducation contre l’extrémisme », sans toutefois reconnaître que de vastes groupes de musulmans étaient emprisonnés.
Divergences d’opinion
Les discussions à propos de ces emprisonnements de masse dans le Xinjiang soulignent les efforts américains qui divergent des priorités du président. M. Trump a rarement critiqué des gouvernements étrangers pour des questions de droits de la personne ou de politiques anti-libérales, et a en fait encensé des dictateurs, y compris M. Xi.
L’administration Trump a toutefois confronté la Chine sur des questions économiques – les deux pays sont engagés dans une guerre commerciale -, mais n’a presque rien dit à propos des abus généralisés des forces de sécurité chinoises.
« L’ampleur est ahurissante », a dit le sénateur républicain Marco Rubio, à propos des emprisonnements de musulmans. « Cela implique non seulement de l’intimidation pour des raisons politiques, mais également une volonté de priver les gens de leur identité – l’identité ethnique ou religieuse – à une échelle qui pourrait bien ne jamais avoir été constatée depuis le début de l’époque contemporaine.
Les Ouïghours sont un groupe turcophone qui est majoritairement de confession musulmane sunnite. Avec une population d’environ 11 millions d’habitants, les Ouïghours forment le plus grand groupe ethnique du Xinjiang. Certaines villes et villages qu’ils considèrent comme étant leur terre natale sont vidées, alors que les forces de sécurité déménagent de force plusieurs Ouïghours dans des camps de détention, parfois pour plusieurs mois.
« Terrorisme »
Voilà plusieurs années que des responsables chinois évoquent la nécessité de combattre ce qu’ils définissent comme du terrorisme, des mouvements séparatistes et de l’extrémisme religieux dans le Xinjiang. En 2009, des violences ethniques ont éclaté dans la région. Des forces de sécurité ont mené une vaste répression en réponse, mais la construction des camps, qui contiennent aujourd’hui jusqu’à un million de personnes, n’a pas commencé avant l’arrivé de Chen Quanguo, qui est devenu chef du Parti dans le Xinjiang en août 2016, après un passage par la Région autonome du Tibet.
La demande du Congrès américain, détaillée dans une lettre datée du 28 août, nomme M. Chen parmi les sept responsables chinois qui devraient être sanctionnés.
À Washington, les responsables s’attaquant à la question des Ouïghours et d’autres musulmans chinois agissent de la sorte dans l’ombre des meurtres en série, des viols et des exils forcés des musulmans rohingyas par l’armée birmane, qui ont débuté au Myanmar en août 2017. Plus de 700 000 Rohingyas ont trouvé refuge au Bangladesh voisin, et vivent dans des conditions de misère.
Certains américains considèrent les actions du gouvernement chinois comme une autre forme du génocide survenu au Myanmar, selon des gens au fait des discussions, et qui ont réclamé l’anonymat.
La question des Ouïghours a été soulevée en juillet lors du premier forum international de niveau ministériel sur la liberté religieuse à l’échelle mondiale, un événement président par le secrétaire d’État américain Mike Pompeo et le vice-président Mike Pence.
Dans une déclaration transmise au New York Times, le département d’État a indiqué que des responsables « étaient fortement troublés par l’accroissement de la répression de la part du gouvernement chinois ».
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