La Coupe du monde des échecs est plongée dans la tourmente après qu’un grand maître eut soutenu qu’il ne pouvait pas porter de shorts parce qu’il « ressemblait à un tzigane ».
Selon ce que rapporte le quotidien britannique The Telegraph, le Canadien Anton Kovaliov a quitté le tournoi au gros lot de 1,6 million $ quelques minutes avant son match de troisième ronde, samedi. Son départ fait suite à une altercation avec l’un des principaux organisateurs de l’événement.
M. Kovaliov, âgé de 25 ans et d’origine ukrainienne, s’était présenté vêtu des mêmes shorts bariolés qu’il portait lors des précédentes rondes du tournoi, au cours desquelles il a battu l’Indien Vishy Anand, un ancien champion du monde.
Mais 15 minutes avant le premier coup, des responsables ont pris M. Kovaliov à l’écart et l’ont informé qu’ils n’approuvaient pas sa tenue vestimentaire.
Le joueur d’échecs a été accusé de violation du code vestimentaire imposé par la Fédération internationale des échecs (FIDE), et a reçu l’ordre d’aller enfiler des pantalons.
M. Kovaliov a refusé, soutenant qu’il n’en avait pas apporté, avant qu’intervienne le vice-président de la FIDE et président de l’European Chess Union Zurab Azmaiparashvili et qu’éclate la dispute.
L’affaire a pris fin lorsque M. Kovaliov a quitté la salle en coup-de-vent, déclarant forfait pour sa partie contre l’Israélien Maxim Rodshtein, et affirmant qu’il avait été victime d’une agression raciale, « intimidé » et « traité comme un moins que rien ».
Lors d’une déclaration effectuée par la suite, M. Kovaliov a précisé que « le problème ne concernait pas les shorts, mais la façon dont j’ai été traité. Je suis arrivé pour la partie et j’ai été approché par l’arbitre qui m’a demandé pour la première fois d’aller me changer. Je lui ai répondu que je n’avais pas de pantalons avec moi. Est ensuite arrivé Zurab, il était très agressif, il me criait dessus et a utilisé le terme « tziganes » pour m’insulter, en plus de mentionner à plusieurs reprises que la FIDE allait me punir ».
« Je lui ai dit que j’avais demandé, lors de la précédente Coupe du monde, si mes vêtements étaient corrects et qu’un membre de l’organisation m’avait assuré que c’était le cas. Zurab a rétorqué qu’il n’en avait cure, qu’il était l’organisateur, maintenant. À ce moment-là, j’étais vraiment en colère, mais j’ai essayé de ne rien faire de stupide, et je lui ai demandé pourquoi il était si brusque avec moi, et il a dit que c’était parce que j’étais un tzigane. »
À ce moment-là, il était temps de partir, a ajouté M. Kovaliov.
« Que feriez-vous dans ma situation? », a demandé le joueur d’échecs.
« Je pense que plusieurs personnes auraient rétorqué avec leurs poings, ou l’auraient au moins insulté. J’ai décidé de partir. Je suis dégoûté par ces gens. Je ne veux pas de l’argent. Je rentre chez moi. »
Interrogé à propos de l’incident, M. Azmaiparashvili n’a pas mentionné les allégations d’insultes raciales.
M. Azmaiparashvili, qui est Géorgien, un pays voisin de l’Ukraine, a affirmé que « Kovaliov s’est simplement mis en colère, a quitté la pièce, et n’est pas revenu ».
À la FIDE, on n’a pas voulu commenter.
L’incident n’est pas le premier à éclater en lien avec le port de shorts.
Lors d’un événement en Serbie, en 1987, un joueur hongrois s’est plaint des shorts du grand maître britannique Nigel Short. Un compromis avait toutefois pu être établi.
Dans une entrevue accordée à des médias russes, M. Azamaiparashvili a tenté de défendre ses déclarations en affirmant que « tzigane » avait ici le sens de « vagabond ».
« En Géorgie, nous avons une expression: « Vêtu comme un vagabond (tramp dans la version anglaise du texte) ». Ne tournons pas autour du pot, tout le monde comprend ce que je veux dire. »