Le référendum non autorisé organisé dimanche par l’opposition vénézuélienne pour demander le départ du président socialiste Nicolas Maduro a été endeuillé par une fusillade qui a fait un mort.
Selon Unité démocratique, la coalition de l’opposition, un groupe « paramilitaire » a ouvert le feu à Catia, un quartier pauvre de Caracas, où plusieurs milliers de personnes participaient à cette consultation symbolique.
« La journée a été entachée par le meurtre d’une femme vénézuélienne qui manifestait et exerçait ses droits », a déclaré le dirigeant de l’opposition Freddy Guevara, évoquant la mort de Xiomara Escot. « Mais la violence ne peut occulter ce qui est arrivé. Les gens n’ont pas peur et ils sont clairs dans leur décision. »
Les images diffusées par la télévision montrent des gens en train de se disperser tandis que résonnent des tirs d’armes à feu. Un grand nombre de personnes cherchent à se mettre à l’abri dans une église.
Plus de cinq millions de Vénézuéliens (soit un sixième de la population) ont participé au scrutin, a annoncé l’opposition dans la soirée, après avoir étendu les horaires d’ouverture des bureaux pour permettre aux électeurs encore bloqués dans des files d’attente de voter.
L’opposition a fait état de deux morts et quatre blessés, mais les services judiciaires ont dit ne pouvoir confirmer qu’un mort et trois blessés.
Ce référendum se tient alors que l’impopularité de Nicolas Maduro atteint un niveau record, alimentée par le marasme économique et par trois mois de manifestations durement réprimées qui ont fait une centaine de morts.
Des queues se sont formées très tôt dans les quelque 2000 bureaux de vote improvisés dans tout le pays dans une atmosphère festive. Les automobilistes roulaient musique et klaxons à fond, des électeurs agitaient des drapeaux. « Yes we can! », criaient certains.
Force
Cet acte de désobéissance civile sera suivi d’un événement baptisé « l’Heure H », peut-être le point de départ d’une grève nationale.
Les Vénézuéliens expatriés ont également participé au vote, de la Floride à l’Australie et jusqu’à Madrid. Selon le chef de l’opposition Henrique Capriles, un million de Vénézuéliens vivant à l’étranger ont voté.
Au Venezuela, certains employés du secteur public, à qui le gouvernement avait conseillé de le pas prendre part au vote, ont cherché à participer en se faisant discrets, par exemple en se rendant déguisés dans les bureaux de vote. « Demain, la réalité sera très différente de celle d’aujourd’hui », a déclaré dimanche matin le président de l’Assemblée nationale, Julio Borges. « Il faut un profond changement dans la manière dont ce pays est gouverné. »
Nicolas Maduro, 54 ans, a qualifié à plusieurs reprises le référendum d’illégal. Il mène de son côté une campagne pour l’élection, le 30 juillet, d’une assemblée constituante qui pourra modifier la Constitution et dissoudre les institutions publiques.
Depuis sa large défaite aux élections législatives de 2015, Nicolas Maduro refuse de reconnaître l’autorité de l’Assemblée nationale, où l’opposition est majoritaire. Pour l’ancien syndicaliste, le Venezuela est victime d’une « guerre économique » et les manifestations de l’opposition ne visent qu’à le destituer, avec le soutien des États-Unis.
Trois questions étaient posées aux électeurs dimanche: rejettent-ils l’assemblée constituante voulue par le pouvoir, souhaitent-ils que l’armée défende la Constitution et veulent-ils que des élections soient organisées avant la fin du mandat de Nicolas Maduro, prévue en 2018?
L’opposition a promis que les résultats seraient communiqués dimanche soir en dépit des obstacles qu’elle devra surmonter. Elle n’aura en effet pas accès aux infrastructures électorales traditionnelles. D’autant que la commission électorale organisait également dimanche une répétition du scrutin du 30 juillet.
L’autorité des télécoms, la Conatel, a ordonné aux stations de radio et aux chaînes de télévision de ne pas utiliser le mot « plébiscite » lors de leurs émissions et leur a demandé ne pas offrir d’espace publicitaire à l’opposition.
Des queues se sont également formées à Caracas dans les centres qui accueillaient le test pour le scrutin du 30 juillet, mais l’ambiance était plus feutrée que dans les bureaux de vote de l’opposition. « Nous voulons que le Venezuela aille de l’avant, que tout cela devienne vraiment un socialisme où nous puissions tous voir une nouvelle aube », a déclaré Iraiz Alfonso, rencontré dans la file d’attente de la consultation-test organisée par le pouvoir. « Nous les pauvres allons être représentés maintenant », dit ce quadragénaire qui travaille dans une maison de retraite.
Dans un appel téléphonique à la télévision publique, le président Maduro a pris acte de la consultation organisée par l’opposition, mais l’a qualifiée de « consultation interne ». « J’appelle l’opposition : (…) ‘calmez-vous’. En tant que président de la République, je lance un appel à la paix », a déclaré le chef de l’État.