Des centaines de compagnies retirent leurs billes publicitaires du site web d’information ultraconservateur Breitbart, et les meneurs de cette campagne de désaffection soutiennent que le mouvement prend de l’ampleur.
Le quotidien britannique The Independent s’appuie sur la base de données du groupe Sleeping Giants, où l’on peut voir que, jusqu’à maintenant, 818 entreprises se sont engagées à retirer Breitbart de leur plan d’achat d’espace publicitaire.
Au cours des derniers mois, plusieurs grands noms de la consommation, tels Kellogs, BMW, Visa, T-Mobile, Nordstrom et Lufthansa ont tous coupé les liens avec le média web.
Et dans la même semaine où le président américain Donald Trump a menacé de couper les vivres fédérales à l’Université de Californie à Berkeley après que le campus eut annulé une conférence du rédacteur en chef de Breitbart, Milo Yiannopoulos, deux universités canadiennes, l’Université de Montréal et l’Université de la Colombie-Britannique, ont elles aussi ajouté leur nom à la liste des contestataires.
En entrevue avec The Independent, Emma Pullman, stratège principale chez SumOfUs, un autre groupe aux visées similaires à celles de Sleeping Giants, a expliqué que la plupart des entreprises étaient des annonceurs pré-existants, tandis que d’autres avaient ajouté Breitbart à leur liste noir, le site web ayant été accusé de publier des articles racistes et misogynes.
Steven Bannon, qui est maintenant stratège principal de M. Trump, s’est vanté l’an dernier du fait que Breitbart était une « plateforme pour l’alt-right« , le mouvement suprématiste blanc.
Breitbart n’a pas répondu à une demande de commentaires.
De son côté, SumOfUs pense maintenant cibler les agences publicitaires tierces, ainsi que les plus grands joueurs comme Amazon et Google. « Si Google cesse de transiger avec Breitbart, cela pourrait vraiment être une étape importante, puisque de nombreuses publicités n’apparaîtraient plus sur le site », mentionne Mme Pullman.
Une pétition demandant à Amazon de cesser tout lien d’affaires avec le site d’information a par ailleurs recueilli plus de 300 000 signatures.
La campagne de SumOfUs a été lancée il y a environ un mois. Toujours au dire de Mme Pullman, seulement 200 compagnies avaient alors déjà cessé d’annoncer sur Breitbart, et le mouvement a depuis pris énormément d’ampleur. « Nous approchons d’un pic d’intérêt et d’activité », mentionne-t-elle.
L’une des entreprises n’ayant pas encore bougé d’un iota est Shopify, un site de commerce électronique canadien qui vend des produits dérivés de Breitbart comme des t-shirts, vendus à 19,95$ US, demandant aux migrants de « Faire la file ».
Plus de 21 000 personnes ont signé une autre pétition, qui demande cette fois à Shopify de cesser de vendre ces produits, mais l’entreprise aurait refusé d’agir de la sorte. La compagnie n’a pas répondu à une demande de précisions.
Alors que Breitbart prévoit prendre de l’expansion en Allemagne, en France et en Italie, des gens se sont dépêchés d’acheter des adresses web françaises comme Breitbart.fr. D’importantes compagnies allemandes comme BMW, la chaîne de restaurants Vapiano, Deutsche Telekom et Lufthansa ont arrêté d’inclure Breitbart dans leur cocktail publicitaire.
Chez le transporteur aérien, on indique que la décision est dûe aux « contenu violent, sexiste, extrémiste et politiquement radical » diffusé sur le site en question.
« L’idée derrière la campagne est que si nous sommes en mesure de convaincre suffisamment de gens, nous bloquerons les capacités d’expansion du site », souligne Mme Pullman. « La campagne est symbolique. C’est une méthode réellement tangible à l’aide de laquelle les gens peuvent convaincre les entreprises de ne pas y annoncer, en plus de critiquer la montée en puissance de l’extrême-droite, ainsi que la haine, la xénophobie et le racisme qui suinte de Breitbart. »