La Russie tente d’influencer les résultats de plusieurs élections importantes prévues cette année dans des pays européens en disséminant de fausses nouvelles, a mis en garde un groupe spécial mis sur pied par l’Union européenne.
Selon ce qu’écrit le quotidien britannique Telegraph, l’UE serait en voie de consacrer davantage de fonds à son groupe d’intervention StratCom Est pour lutter contre cette désinformation, alors que l’on craint que la Russie ne vise les élections prévues en France, en Allemagne et aux Pays-Bas.
« Il existe une énorme campagne au moins partiellement organisée, et disposant de moyens dantesques, contre l’UE, ses politiciens et ses principes », a déclaré au magazine allemand Spiegel une source au fait du dossier.
Pour cette source, il est ainsi « très fortement probable » que la Russie tente d’influencer les élections européennes « comme cela fut le cas aux États-Unis ».
La cible principale est Angela Merkel, qui a fait l’objet d’un « bombardement » de fausses nouvelles dans la foulée de l’adoption de sa politique sur les réfugiés et son appui à l’imposition de sanctions économiques contre la Russie.
La désinformation s’inscrit « dans le cadre d’une politique étatique » et représente un « outil militaire » pour le Kremlin, indique-t-on.
Plus tôt ce mois-ci, un rapport publié par les diverses agences de renseignement des États-Unis révélait que Vladimir Poutine, le président russe, avait personnellement « ordonné le lancement d’une campagne visant à influencer le résultat de l’élection présidentielle ». L’an dernier, le renseignement allemand avait prévenu que des pirates russes pourraient tenter d’avoir un impact sur les élections nationales prévues pour septembre.
Les craintes quant à l’impact de ces fausses nouvelles vont grandissantes, après la publication d’un reportage complètement faux affirmant que la plus vieille église d’Allemagne avait été brûlée par 1000 musulmans scandant « Allahu Akbar » (« Dieu est grand »).
StratCom Est, mise sur pied par l’UE en 2015 pour contrer la propagande et la désinformation russes, affirme avoir déjà découvert des preuves d’une gigantesque campagne de fausses nouvelles ciblant plusieurs pays européens. Les experts travaillant pour cette unité d’intervention ont dit avoir trouvé plus de 2500 exemples de « reportages contredisant directement des informations publiques », publiés dans 18 langues différentes, et ce en seulement 15 mois.
Ces reportages étaient répétés sur une base quotidienne et reproduits dans de nombreuses langues.
Les fausses informations découvertes par l’équipe d’intervention vont des théories de la conspiration à propos des responsables de l’explosion du vol MH17 au-dessus de l’Ukraine aux affirmations voulant que l’UE soit en passe d’interdire les bonhommes de neige, jugés « racistes ».
On retrouve également une fausse vidéo terroriste laissant planer des menaces d’attaques contre les Pays-Bas si le pays appuyait un accord d’association de l’UE avec l’Ukraine.
« Il ne fait aucun doute que la campagne de désinformation pro-Kremlin est une stratégie finement orchestrée », estime le groupe d’intervention, qui fait partie du Service d’action européen extérieur, le service diplomatique de l’UE, sur son site web.
« L’objectif de cette campagne de désinformation consiste à affaiblir et à déstabiliser l’Ouest, en exploitant les divisions ou en créant de nouvelles. Souvent, on emploie des mensonges éhontés, qui cherchent à dénigrer une personne, un groupe politique ou un gouvernement en particulier. »
« Une autre stratégie consiste à répandre le plus grand nombre possible de messages conflictuels, afin de persuader le public qu’il existe tant de versions des événements qu’il est impossible de déterminer la vérité. »
Dans un rapport publié en 2015, le contre-espionnage tchèque expliquait que le but de la désinformation du Kremlin était de « saper la volonté de la société pour de la résistance ou de la confrontation ».
La majeure partie de la désinformation russe est répandue au sein de l’UE par des « acteurs domestiques », qui répètent de façon indépendante les points d’intérêt qui apparaissent d’abord dans les médias contrôlés par l’État russe, puisque ceux-ci correspondent à leur vision idéologique, mentionne Jakub Janda, directeur adjoint du groupe de réflexion European Values à Prague, qui surveille les efforts présumés de désinformation russe, et travaille en étroite collaboration avec le groupe d’intervention de l’UE.
L’homme donne ainsi l’exemple de Milos Zeman, le président eurosceptique de la République tchèque, comme étant l’un de ces politiciens européens bien placés qui « copient-collent les messages russes et aident la politique étrangère russe en répétant leurs affirmations sur la Syrie et l’Ukraine ».