Après cinq ans de procédure, la Cour suprême des États-Unis examinera à partir de mardi le litige sur les brevets opposant Apple et Samsung, les deux principaux fabricants de téléphones mobiles au monde.
Le groupe californien accuse depuis 2011 son concurrent sud-coréen d’avoir violé des brevets relatifs à son iPhone et d’avoir copié le dessin de son combiné vedette. Samsung a été reconnu coupable en 2012 et finalement condamné à verser 548,2 millions de dollars US à Apple.
Le groupe sud-coréen, qui a versé cette somme en décembre dernier, conteste son montant, estimant qu’il n’aurait pas dû verser 399 millions $ US correspondant à trois brevets relatifs aux coins arrondis de la face avant de l’iPhone, au panneau et à la grille colorée des icônes représentant les programmes et les applications.
La décision de la plus haute juridiction américaine, attendue d’ici fin juin, pourrait avoir un impact à long terme sur les concepteurs et les fabricants de produits. Si la Cour donne raison à Samsung, cela pourrait à l’avenir limiter le montant réclamé en cas de violation de brevets liés au design. C’est la première fois en plus de 120 ans que la Cour suprême est amenée à se prononcer sur une affaire de violation de brevets liés au design. À l’époque, les produits incriminés étaient des tapis et des moquettes.
Samsung considère que l’amende ne devait pas engloutir l’intégralité de ses bénéfices réalisés avec les téléphones au coeur de cette guerre des brevets. Le groupe sud-coréen souligne que les brevets concernent des éléments qui ne participent que marginalement à l’élaboration d’un produit complexe comprenant lui-même des milliers de caractéristiques brevetées. Apple, de son côté, juge que Samsung a été correctement sanctionné pour avoir enfreint sa propriété intellectuelle.
Critères
Au terme de nombreuses années d’âpre bataille, cette affaire est devenue essentiellement financière, estime Michael Risch, professeur à l’université de droit Charles Widger School of Law de la Villanova University. « La violation a été reconnue, il s’agit à présent de savoir si ce montant élevé a été bien calculé », a-t-il dit.
Michael Risch fait partie d’un groupe d’une cinquantaine de professeurs qui ont rédigé un rapport pour soutenir Samsung dans cette affaire, aux côtés des géants de la Silicon Valley tels que Facebook et Alphabet, maison mère de Google.
Apple de son côté est soutenu par des designers et des spécialistes de la mode tels que Calvin Klein ou Alexander Wang, qui jugent important le rôle du design dans les critères d’achat des consommateurs.
La loi américaine exige d’une entreprise reconnue coupable de viol d’un brevet de reverser à l’entreprise lésée la totalité des profits réalisés sur l’objet incriminé (« violation d’un article de fabrication »). Samsung estime dans le litige l’opposant à Apple que l’objet incriminé ne peut être le téléphone dans sa globalité, comme l’ont calculé les précédentes juridictions. En conséquence, selon le groupe sud-coréen, le montant des dommages et intérêts pour sa condamnation doit être révisé à la baisse.
Si la Cour suprême ne lui donne pas raison, Samsung dit qu’un fabricant de voiture reconnu coupable de contrefaçon pour un porte-gobelet devra alors reverser l’intégralité de ses bénéfices dans la même situation.
Apple admet qu’un « article de fabrication » peut être un simple composant d’un produit mais le groupe californien estime que dans le litige en cours, les preuves montrent qu’il s’agit du téléphone tout entier vendu par Samsung.