Les forces soutenues par la Turquie s’enfonçaient lundi dans le territoire syrien, s’attirant les critiques des États-Unis qui se sont dits préoccupés par l’objectif poursuivi par Ankara.
Au commencement de cette opération qui dure depuis près d’une semaine, les chars, l’artillerie et l’aviation turcs ont appuyé des rebelles syriens pour leur permettre de reprendre la ville de Djarablous, mais les forces turques opèrent désormais dans des territoires contrôlés par les Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance formée par les miliciens kurdes des YPG et des combattants rebelles arabes avec le soutien des États-Unis.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), 41 civils ont été tués dimanche dans les raids aériens turcs accompagnant l’offensive terrestre. Ankara a démenti ces chiffres, assurant n’avoir tué que 25 combattants kurdes.
Des renforts ont été déployés dans Manbij, à une quarantaine de kilomètres de Djarablous a confirmé lundi un porte-parole des autorités autonomes kurdes de Syrie, mais il ne s’agit pas de combattants kurdes des Unités de protection populaire (YPG).
Renforts
« Il y a des renforts, mais pas des YPG. Parce que les YPG sont à l’est de l’Euphrate », a dit à Reuters le directeur du centre de presse du Rojava, Ibrahim Ibrahim.
Redur Xelil, porte-parole en chef des YPG, a été aussi catégorique: « Il n’y a absolument aucun renfort militaire des YPG en cours de transfert vers Manbij », a-t-il dit à Reuters.
« Les affirmations de la Turquie qui dit combattre les YPG à l’ouest de l’Euphrate n’ont pas la moindre once de vérité et ne sont qu’un prétexte fragile pour étendre son occupation en territoire syrien », a-t-il ajouté.
Manbij, sur la rive occidentale de l’Euphrate, a été reprise le 12 août dernier aux djihadistes de l’État islamique (EI) par les Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance formée par les miliciens kurdes des YPG et des combattants rebelles arabes avec le soutien des États-Unis.
Elle est désormais dans le viseur de forces rebelles pro-turques, a déclaré dimanche à Reuters le colonel Ahmed Osman, chef du groupe rebelle Sultan Mourad.
À Ankara, le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a accusé les miliciens kurdes de se livrer à des opérations de nettoyage ethnique dans le nord de la Syrie. Il les a appelés à se replier immédiatement à l’est de l’Euphrate, réfutant de fait les affirmations des autorités autonomes kurdes de Syrie.
Lancée mercredi par Ankara, l’opération « Bouclier de l’Euphrate » poursuit deux objectifs: chasser le groupe État islamique des régions frontalières et empêcher les miliciens kurdes syriens de remporter de nouvelles victoires et de progresser à l’ouest de l’Euphrate.
Washington s’inquiète
Cette incursion militaire turque en appui à des forces rebelles hostiles aux FDS soutenues elles par les États-Unis a fait franchir un degré supplémentaire de complexité à la guerre civile syrienne.
Pour les États-Unis, les affrontements entre les forces turques et certaines composantes de la rébellion syrienne « dans des secteurs où l’EI n’est pas présent » sont « inacceptables et source d’une profonde inquiétude », a dit Brett McGurk, envoyé spécial des États-Unis auprès de la coalition mise en place contre l’EI, sur son compte Twitter.
« Nous appelons tous les acteurs armés à se retirer », a-t-il ajouté, insistant sur la nécessité d’unir les forces contre l’EI.
Le département d’État a en outre estimé que l’absence de coordination dans le nord de la Syrie nuisait au combat contre l’Etat islamique et a une nouvelle fois demandé aux YPG de repasser sur la rive orientale de l’Euphrate tout en soulignant que l’essentiel des miliciens kurdes en avaient déjà pris la direction.