La présidente du Parti démocrate américaine a présenté sa démission, dimanche, dans la foulée de la vindicte populaire découlant de courriels embarrassants coulés, espérant tuer dans l’oeuf une rébellion croissante lancée par des partisans de Bernie Sanders, à la veille de la convention visant à officialiser la candidature d’Hillary Clinton pour la présidentielle américaine.
Comme l’écrit Reuters, l’acrimonie résiduelle des primaires entre Mme Clinton et M. Sanders a refait surface après que 19 000 courriels du Comité national démocrate (DNC), coulés vendredi, eurent confirmé l’accusation de M. Sanders voulant que le parti a choisi son camp dans le cadre de cette course.
S’exprimant par voie de communiqué, la présidente du DNC Debbie Wasserman Schultz a déclaré que la meilleure façon d’accomplir son objectif consistant à installer Mme Clinton dans la Maison-Blanche consistait à démissionner après la convention. Plus tôt, dans la même journée, M. Sanders avait lui-même réclamé ce départ.
Cette fureur est un dur coup porté à un parti désirant projeter une image d’unité, en contraste avec la volatilité du candidat républicain, Donald Trump, qui a été officiellement déclaré candidat lors d’une convention rocambolesque à Cleveland, la semaine dernière.
L’affaire a également relégué dans l’ombre les préparations du couronnement de Mme Clinton à Philadelphie. Cette dernière sera la première femme candidate à la présidence pour un grand parti politique américain.
La convention démocrate, d’une durée de quatre jours, prend son envol lundi. Point positif pour Mme Clinton, le New York Times a rapporté que l’homme d’affaires et ancien maire de New York Michael Bloomberg l’appuiera lors d’un discours à heure de grande écoute, lundi, en affirmant qu’elle est le meilleur choix pour les électeurs modérés en 2016.
Les courriels dévoilés vendredi par WikiLeaks indiquent que des responsables du DNC ont exploré des méthodes visant à saper la campagne présidentielle du champ gauche de M. Sanders, y compris en soulevant des questions pour savoir si celui-ci, qui s’affiche comme étant de confession juive, était un athée.
De son côté, M. Sanders a affirmé que Mme Schultz, une membre de la Chambre des représentants originaire de Floride, avait pris la bonne décision pour l’avenir du Parti démocrate. « Le leadership du parti doit toujours demeurer impartial dans le processus de nomination présidentielle, ce qui ne s’est pas produit dans la course de 2016 », a-t-il indiqué.
Connexion russe?
Le camp Clinton s’est interrogé à savoir si Moscou aurait pu jouer un rôle dans le piratage des courriels du parti, et si la Russie était intéressée à aider M. Trump, qui a échangé de bons mots avec le président russe Vladimir Poutine.
« Ce qui est troublant pour nous est le fait que des experts nous confient que des individus payés par l’État russe se sont introduits dans les systèmes du DNC, ont volé ces courriels, et d’autres experts soutiennent que des Russes publient ces courriels dans le but d’aider Donald Trump », a déclaré le président de la campagne Clinton, Robby Mook, sur les ondes de l’émission State of the Union du réseau CNN.
De son côté, le gérant de la campagne Trump, Paul Manafort, a rétorqué que le camp Clinton tentait de distraire les gens de la discorde en prévision de la convention. « Ces courriels révèlent que le système était vraiment truqué, que Bernie Sanders… n’a jamais eu de chance », a-t-il lâché sur ABC.
Au cours de la campagne des primaires, M. Sanders a répété sa frustration envers un DNC et l’establishment du parti qui, selon lui, prenaient position contre lui, et la colère de l’ex-candidat et de ses partisans pourrait bien nuire au bon déroulement de la convention.
« Je ne suis pas choqué, mais je suis déçu », a déclaré M. Sanders à propos des courriels, plus tôt, dimanche.
Ces messages montrent les responsables du DNC cherchant à trouver diverses façons de couper l’herbe sous le pied de M. Sanders. Le responsable financier du DNC, Brad Marshall, s’est excusé sur Facebook, samedi, pour un courriel dans lequel il discute de la façon dont certains électeurs du Kentucky et de la Virginie occidentale rejetteraient un athée.
En entrevue à l’émission 60 Minutes dans un segment diffusé dimanche, Mme Clinton a affirmé qu’elle n’avait pas lu les courriels, mais qu’il était « erroné et inacceptable » d’impliquer la religion dans le processus politique
Des partisans en colère
Les courriels ont suscité l’ire de bien des partisans de M. Sanders, qui était déjà déçus du choix, officialisé vendredi, du sénateur Tim Kaine comme le colistier de Mme Clinton. M. Kaine, 58 ans, qui pourrait aller convaincre les indépendants et les modérés, n’a jamais été considéré comme un libéral.
M. Sanders, qui a appuyé Mme Clinton et qui s’exprimera en son nom lundi lors de la convention, a dit qu’il aurait préféré le choix de la sénatrice Elizabeth Warren, une favorite de l’aile libérale du parti. « Je connais Tim depuis plusieurs années, c’est un homme très intelligent et très sympathique, a-t-il indiqué à l’émission Meet the Press, sur NBC. Il est plus conservateur que moi. Aurai-je préféré voir quelqu’un comme Elizabeth Warren être choisie par Mme Clinton? Certainement. »
Brandissant des fourches visant à associer Mme Clinton au diable, des centaines de partisans de M. Sanders ont défilé dans les rues de Philadelphie, dimanche, pour clamer leur sentiment de trahison face au DNC.
« Cela a simplement confirmé tout ce que nous pensions, tout ce que nous croyions être vrai, que tout était arrangé dès le début, et que c’était plutôt une question de tricher pour s’arranger pour qu’elle l’emporte », a lancé une partisane de M. Sanders, Gwen Sperling.