Les fabricants et géants chinois du web sont aux trousses de leurs homologues américains dans la course à la conception de voitures automatiques, mais le chemin vers le marché est encore encombré de nids-de-poule.
Comme l’écrit l’Agence France-Presse, alors que Google travaille sur des véhicules autonomes depuis au moins six ans, et que les joueurs traditionnels du marché automobile tels Volkswagen, Volvo et Toyota ne sont pas loin derrière, les entreprises chinoises ne sont que récemment entrées dans la course, qu’il s’agisse du géant du web Baidu ou du fabrican Changan.
La semaine dernière, en prévision du Salon de l’auto de Pékin qui doit s’ouvrir lundi, deux voitures autonomes de Changan ont parcouru 2000 kilomètres de routes montagneuses entre Chongqing (sud-ouest) et la capitale, lors du premier test autonome longue distance du pays.
Un autre géant chinois de l’Internet, LeECO, s’aventure également dans le domaine des technologies autonomes, et dévoilera mercredi, à Pékin, une voiture électrique qui peut se stationner toute seule et qui peut être appelée à l’endroit où se trouve son propriétaire par une application mobile.
Et à la fin de l’an dernier, Baidu a testé le premier véhicule autonome de fabrication locale, une BMW modifiée, lors d’un trajet de 30 kilomètres dans les rues de Pékin.
Malgré l’entrée relativement tardive de la Chine dans le domaine, des analystes estiment que le pays pourrait devenir l’un des marchés-clés pour les voitures autonomes, en raison d’un environnement réglementaire et d’un bassin de consommateurs plus favorable. Le Boston Consulting Group (BCG) estime ainsi que les ventes de telles voitures y atteindront 12 millions d’ici 2035, et que plus du quart de celles-ci auront lieu en Chine.
Des véhicules ajustant automatiquement leur trajet en réaction aux informations en temps réel sur la circulation pourraient résoudre le problème de trafic chronique dans les grandes villes chinoises, a confié Xavier Mosquet, du BCG, à l’AFP. « Si elles croient pouvoir améliorer la circulation, les autorités chinoises feront tout ce qu’elles pourront pour favoriser le développement de cette technologie, puis son utilisation », a-t-il dit.
Taxis robots
Les inquiétudes du public à propos de la sécurité des voitures sans conducteurs y sont bien moins importantes qu’ailleurs, selon un sondage effectué en 2015 par la firme Roland Berger. Ledit sondage révèle que 96 % des Chinois envisageraient d’emprunter une auto sans conducteur pour presque tous les déplacements quotidiens, comparativement à 58 % des Américains et Allemands.
Dans un pays connu pour ses accidents, la promesse d’une meilleure sécurité à l’aide des technologies autonomes pourrait également se montrer attirante. Le prix ultime, poursuivent les analystes, sera le moment où les entreprises de transport collectif comme le service de taxi Uber, ou son rival chinois Didi, pourront déployer de gigantesques flottes de taxis robots.
« Le véritable avantage pour des technologies entièrement autonome pourra être constaté lorsque les voitures sur les routes n’appartiendront plus à des gens, mais par des services de gestion de flottes de véhicules », lance Bill Russo, directeur exécutif de la firme de consultants Gao Feng.
« C’est à ce moment-là que vous pensez à retirer le conducteur de l’équation. La mobilité sur demande est très populaire ici. »
Avec un marché prêt à accueillir les véhicules, la Chine pourrait bientôt devenir l’endroit de prédilection pour que les entreprises perfectionnent leurs technologies. Le Suédois Volvo, qui appartient à la Chinoise Geely depuis 2010, a annoncé ce mois-ci des plans visant à tester jusqu’à 100 de ses véhicules sur des routes chinoises cette année.
Changan, un partenaire de Ford, devrait déployer ses véhicules autonomes pour l’autoroute à partir de 2018, alors que la production de masse de l’équivalent urbain doit attendre 2025.
« Est-ce que la voiture choisit? »
Baidu, pendant ce temps, dit qu’elle lancera des autobus autonomes vers 2018, autobus qui circuleront sur certains trajets fixes dans des villes chinoises sélectionnées. Comme Google, le géant du web possède déjà des cartes routières détaillées et a de l’expérience en sécurité numérique, et une porte-parole a confié à l’AFP qu’elle recevait des « commentaires très positifs » de la part du gouvernement.
Mais les analystes se montrent plus prudents, et croient que les véhicules lents sans conducteur n’apparaîtront pas dans les villes avant au moins 2020.
Les coûts de production sont par ailleurs encore trop élevés pour qu’une flotte de taxis robots soit viable, mentionne M. Mosquet, du BCG.
« Plusieurs questions doivent encore recevoir des réponses » avant que les voitures autonomes puissent être offertes au public », indique un autre analyste, Jeremy Carlson. Celui-ci parle de « situation chaotiques » sur des routes partagées avec des cyclistes et des piétons, et des infrastructures insuffisantes.
Pour d’autres, il y a également des dilemmes moraux. « Si vous avez quelqu’un qui saute devant une voiture autonome, est-ce que celle-ci doit choisir entre le fait de tuer la personne ou braquer et provoquer un accident mortel pour le passager? », s’interroge Robin Zhu, analyste senior chez Sanford C. Bernstein. « Si votre voiture pouvait choisir de vous tuer, monteriez-vous à bord? »