L’auteur de l’attentat-suicide qui a tué mardi dans le coeur historique d’Istanbul au moins 10 personnes, dont neuf Allemands, est un jihadiste du groupe État islamique (EI), a affirmé le premier ministre islamo-conservateur turc Ahmet Davutoglu.
« Nous avons déterminé que l’auteur de cette attaque terroriste à Sultanahmet est un étranger membre de Daech (acronyme arabe de l’EI) », a dit M. Davutoglu lors d’une brève déclaration télévisée à Ankara.
À l’issue d’une réunion d’urgence autour de M. Davutoglu, le porte-parole du gouvernement Numan Kurtulmus a annoncé plus tôt que l’auteur de l’attentat avait été identifié comme un Syrien né en 1988, sans toutefois donner son nom.
Dans l’après-midi, M. Kurtulmus a indiqué à la presse que cette personne était tout récemment entrée en Turquie depuis la Syrie.
L’explosion intervient alors que le pays est en état d’alerte maximum depuis l’attaque la plus meurtrière survenue sur son sol, attribuée au groupe État islamique (EI), qui a fait 103 morts en octobre devant la gare centrale d’Ankara.
« Je condamne fermement cette attaque terroriste commise par une personne d’origine syrienne », a lancé le président Recep Tayyip Erdogan lors d’un discours prononcé à Ankara, semblant pointer du doigt une responsabilité des jihadistes.
Longtemps soupçonné de complaisance envers les rebelles radicaux syriens, le régime islamo-conservateur turc a rejoint l’été dernier la coalition antijihadiste internationale et multiplié les arrestations de membres présumés de l’EI.
La déflagration, très puissante, s’est produite à 10h18 locales (08h18 GMT) dans le quartier de Sultanahmet, sur l’ancien hippodrome qui borde la basilique Sainte-Sophie et la Mosquée bleue, les deux monuments les plus visités de la plus grande ville du pays.
Les premières photos prises sur place montrent plusieurs corps démembrés couchés sur le sol pavé de cette grande esplanade, traversée chaque année par des millions de touristes venus du monde entier.
Berlin a recommandé « avec insistance » aux Allemands d’éviter « provisoirement » les « attractions touristiques » à Istanbul, alors que Paris a conseillé aux Français d’éviter le secteur de l’attentat.
Sitôt après l’explosion, de nombreux témoins ont évoqué le scénario d’un attentat suicide.
« J’ai entendu une très forte explosion, et puis de nombreux cris. Et puis j’ai vu une boule de feu et je me suis enfui », a raconté à l’AFP un homme turc qui n’a pas donné son nom, « je suis sûr à 100% qu’il ne s’agissait pas d’une bombe mais d’un attentat suicide ».
La Turquie vit en état d’alerte permanent depuis le double attentat suicide jihadiste qui a visé un rassemblement de manifestants prokurdes le 10 octobre devant la gare centrale d’Ankara, faisant 103 morts et plus de 500 blessés.
« Fermeté »
En janvier 2015 déjà, une femme kamikaze originaire du Daguestan russe, dont la presse locale avait affirmé qu’elle avait rejoint les rangs jihadistes en Syrie, s’était fait exploser devant un poste de police du quartier de Sultanahmet. Un policier avait été tué.
« Le mode opératoire, un kamikaze, et la cible, un groupe de touristes, suggèrent un attentat jihadiste », a commenté mardi à l’AFP un diplomate occidental.
« Si c’est le cas, c’est le signe que Daech (l’acronyme arabe de l’EI) a décidé de s’en prendre à l’État turc », a-t-il ajouté, « jusque-là, ses cibles en Turquie étaient les Kurdes ».
La Turquie est également secouée depuis l’été dernier par la reprise de combats meurtriers entre les forces de sécurité turques et le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui ont fait voler en éclat un cessez-le-feu qui tenait depuis plus de deux ans.
Les rebelles kurdes visent en priorité militaires et policiers mais le 23 décembre dernier, une organisation armée kurde, les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), a revendiqué une attaque au mortier qui a visé l’aéroport Sabiha Gökçen, sur la rive asiatique d’Istanbul, faisant un mort et un blessé.
M. Erdogan a promis à plusieurs reprises d’éradiquer le PKK.
« La fermeté de la Turquie n’a pas changé », a déclaré mardi l’homme fort du pays. « La Turquie est la première cible de toutes les organisations terroristes actives dans la région parce qu’elle les combat toutes avec la même détermination », a-t-il ajouté.
Le premier ministre français Manuel Valls a souligné que « la France, la Turquie, tous les pays qui sont attaqués par le terrorisme doivent être solidaires ».