Lorsque l’extrême droite séduit l’électorat aux élections en Autriche, en France, en Allemagne, le populisme devient un enjeu en pointant le président Donald Trump. Alors que devant la répression de la droite espagnole, il s’agit de choisir son camp: pour ou contre l’indépendance. Que retire-t-on de la crise catalane?
«En Catalogne, on a essayé de miner les règles de base de notre système démocratique», a affirmé le roi d’Espagne Felipe VI au Forum économique mondial de Davos en Suisse devant les représentants de 70 pays et de 30 000 professionnels de l’économie, rapporte La Vanguardia le 24 janvier. Bien que les amateurs la télésérie Game of Thrones n’y verront rien d’anachronique dans le fait qu’un roi intervienne dans un conflit mettant en péril l’unité de son pays, et que ceux qui se réfèrent à la télésérie House of Cards pour saisir les dessous de la politique n’y verront pas que l’arnaque se situe à même l’anachronisme, l’intervention du roi est inquiétante en réalité.
Outre la répression policière lors du référendum du 1er octobre en Catalogne, le directeur de la revue catalane Quadern de les idées, les arts i les lletres, Sébastien Bauer évoque les prises de paroles troublantes du nouveau monarque qui a succédé à son père en 2014. Normalement, la Constitution encadre les prises de parole du roi qui n’a pas d’autorité sur les affaires de politique intérieure. Felipe VI a pris parti en demandant au président d’Espagne Mariano Rajoy de «rétablir l’ordre constitutionnel». De plus, il s’est exprimé devant le portrait de Charles III qui imposa le castillan comme langue unique sur tout le territoire au 18e siècle, une rhétorique agressive puisque le basque, le catalan et le gallego partagent ce statut de langue officielle sur la péninsule ibérique mis à part le Portugal.
Au forum de Davos, la défense «royale» de la Constitution est l’occasion de souligner les quatre décennies d’existence du texte et de revendiquer «l’importance durable de l’esprit d’entente et de solidarité» qui a permis à l’Espagne de «s’engager dans la voie de la paix, de la liberté et de la prospérité» comme jamais auparavant, a assuré le monarque. Par contre, Sébastien Bauer écrit dans le Monde diplomatique de novembre 2017 que les pères de la Constitution de 1978 se sont limités à un compromis entre démocratie et franquisme (fascisme) afin d’éviter la guerre civile. Au lieu de faire évoluer le texte dans la transition démocratique, le pays l’a sanctifié.
L’indépendance de la Catalogne provient en partie de l’hostilité envers les vestiges de l’absolutisme où le roi, l’Église et les grands demeurent les principaux propriétaires terriens du pays. Cette élite bénéficie des aides européennes au développement des régions, dont 1,85 million d’euros en 2003 pour la défunte duchesse d’Albe, rapporte le directeur de la revue catalane.
«L’Espagne a aujourd’hui une économie très compétitive qui représente une opportunité d’investissement remarquable», a affirmé le roi pour vendre les bienfaits des finances espagnoles. «Source de préoccupation il y a quelques années dans le cadre de l’Union européenne (UE), l’Espagne guidera dorénavant la croissance et fera une contribution positive à la consolidation et au renforcement de l’UE», poursuit le roi.
L’opposition que le roi Felipe VI tente d’orchestrer entre la croissance économique et le processus démocratique, le président catalan Carles Puigdemont a été réélu, est-elle inquiétante dans une Union européenne où l’extrême droite gagne des voix?
ALENA
Pendant la campagne électorale canadienne de 2015, l’ex-premier ministre conservateur Stephen Harper a sorti l’entente sur le partenariat transpacifique (PTP) comme un lapin de son chapeau. «Il sacrifie nos fermes familiales, il abandonne les travailleurs automobiles, il va faire grimper le coût des médicaments, et nos artistes et notre culture sont plus que jamais en péril», avait rétorqué son homologue néo-démocrate, Thomas Mulcair. Alors que le gagnant de cette course à la chefferie, le libéral Justin Trudeau a affirmé que son parti est en faveur de l’échange international et qu’ils s’engagent à étudier l’accord avant de le ratifier, rapporte Radio-Canada le 5 octobre 2015.
Cet épisode électoral rappelle que ces accords économiques qui prennent forme dans des forums économiques comme celui de Davos conduisent des politiciens, dont le temps au pouvoir est compté ou qui n’ont pas la majorité démocratique, à signer des ententes lourdes de conséquences pour l’ensemble des citoyens. Le Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC) a mis en ligne une vidéo rappelant cet état de fait, vidéo qui porte sur le chapitre 11 de l’Accord de libre-échange canado-américain (ALENA) dont la sixième ronde de négociation a eu lieu à Montréal du 23 au 27 janvier.
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